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Un monde en noir et blanc

14 mai 2011

La montagne sacrée d'Arnold Fanck (Der heilige Berg - 1926)

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Diotima (Leni Riefenstahl) est danseuse. Habitée par son art, elle trouve dans la communion avec les éléments naturels une sorte d'ivresse dionysiaque : l’écume jaillissante des vagues sur les rochers, la lumière du soleil, le souffle du vent dans la montagne… C’est d’ailleurs dans une station alpestre qu’elle décide de présenter son nouveau spectacle. Deux amis, Karl (Luis Trenker) et Vigo (Ernst Petersen) assistent à la première. Bouleversé par la beauté de la jeune femme, Karl s’éclipse avant la fin de la représentation, pour s’isoler dans la montagne, tandis que Vigo, également fasciné, mais moins émotif, la rejoint pour lui offrir un edelweiss.

Les mois passent. Profitant des premiers beaux jours, Diotima part se promener. Atteignant un refuge, elle rencontre Karl, dont le sombre mystère la trouble à son tour. Les deux amants décident bientôt de se fiancer. Mais la veille de la cérémonie, Diotima retrouve Vigo, qui participe à une compétition de combiné nordique. La danseuse assiste aux épreuves, que Vigo remporte devant Colli (Friedrich Schneider), un champion local. Diotima s’empresse de féliciter le jeune homme. Cependant, Karl surprend leurs effusions. Se croyant trahi, il entraîne alors son ami dans une ascension périlleuse, la face nord du Santo, où se jouera leur destin…

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Une histoire difficile à résumer, car le scénario d’Arnold Fanck manque de fluidité, alternant un peu maladroitement scènes dramatiques et échappées visuelles dans des décors alpestres grandioses, qui sont la véritable raison d’être de La montagne sacrée. De fait, il s’agit avant tout d’un film de montagne, genre dont le réalisateur fut l’un des pionniers et qui lui apporta une certaine renommée grâce, notamment, à L'Enfer blanc du Piz Palu, codirigé avec Georg Wilhelm Pabst (Quentin Tarantino y fait une allusion discrète dans Inglorious Basterds). Cette orientation donne lieu à des prises de vue sophistiquées, en particulier lors de la course de ski de fond, moment le plus spectaculaire du film, où la caméra suit au plus près Vigo et Colli.

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La trame de La montagne sacrée peut-être qualifiée de romantique, puisque s’appuyant sur la vision d’une nature dont les bouleversements sont le reflet des sentiments agitant l’âme des personnages. Plusieurs scènes semblent d’ailleurs directement inspirées d’œuvres picturales de ce courant artistique. Ainsi, lorsque Karl se réfugie au sommet de la montagne après avoir surpris Diotima et Vigo, on songe immanquablement au Voyageur contemplant une mer de nuages (Der Wanderer über dem Nebelmeer), de Caspar David Friedrich. Le nom même de l’héroïne est une référence au poète romantique Friedrich Hölderlin, qui l’utilisa pour désigner celle dont il était épris, Susette Gontard, dans son roman Hyperion et plusieurs de ses élégies :

 

Regarde ! avant que notre tertre, ô mon amour, s’affaisse,

Le jour marqué viendra, et mon chant mortel

Le verra, Diotima, te mettre au rang

Des héros et des dieux, ce jour à ton image.

 



Par certains aspects, cependant, La montagne sacrée reste encore marqué par l’esthétique expressionniste. C’est le cas, par exemple, du plan où l’ombre de la mère, inquiète de ne pas voir revenir Karl, se dessine sur un mur. Cette influence transparaît également dans le jeu parfois très appuyé des comédiens.

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Mais La montagne sacrée n’est pas qu’un simple objet de curiosité. La présence à l’affiche de Leni Riefenstahl altère nécessairement le regard que le spectateur d’aujourd’hui peut porter sur ce film. Par son exaltation de l’héroïsme, de l’esprit de sacrifice, par sa glorification du corps athlétique, il porte en effet en lui un certain nombre de valeurs douteuses que la propagandiste du Troisième Reich célébrera quelques années plus tard dans Sieg des Glaubens et, surtout, Triumph des Willens. Certes, La montagne sacrée ne saurait être qualifiée d’œuvre de propagande avant l’heure. D’autant qu'Arnold Fanck ne prit sa carte au NSDAP que tardivement, en 1940, davantage pour pouvoir continuer à tourner dans son pays que par réelle conviction idéologique (son adhésion tardive l'obligea à s'expatrier un temps au Japon). Il n’empêche, elle est révélatrice d'un état d'esprit qui débouchera au début des années 1930 sur le Nazisme. Le grand critique de cinéma Siegfried Kracauer nota d'ailleurs à son propos : Bien que cette sorte d'héroïsme fût trop singulier pour servir de modèle aux gens des vallées, elle était enracinée dans une mentalité apparentée à l'esprit nazi. (...) En outre, l'idôlatrie des glaciers et des rochers était symptomatique de l'antirationnalisme sur lequel les Nazis allaient capitaliser.

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Quelques mots, pour conclure, sur l'édition DVD commercialisée par MK2. La copie proposée est de bonne facture, sans être exceptionnelle. Elle bénéficie d'un nouvel accompagnement musical, signé Aljoscho Zimmermann, qui met parfaitement en valeur les images. Côté bonus, on doit se contenter d'une analyse de Patrick Zeyen intitulée Un simple objet de curiosité ?, d'une quinzaine de minutes.

Ma note : «««««

A lire

De Caligari à Hitler, L'âge d'homme, 2009

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10 mai 2011

Le vertige du progrès de Carl Ludwig Achaz-Duisberg (Arte - 31 mai 2011 à 1h45)

Les_vertiges_du_progr_s

Arte proposera le 31 mai prochain une perle rare de l'histoire du cinéma, Le vertige du progrès (Sprengbagger 1010), unique réalisation de Carl Ludwig Achaz-Duisberg, fils du capitaine d'industrie Carl Duisberg. Ce mélodrame illustrant le conflit entre la nature et la technique, réunit quelques grands noms du cinéma allemand de l’époque, dont la star de Metropolis, Heinrich George, dans le rôle d’un industriel sans scrupule, ou encore Gertrud Arnold, l’interprète de la reine Ute dans Les Nibelungen. A noter qu’il s’agit de l’une des rares œuvres du muet dont la musique originale a été conservée.

Synopsis - Un ingénieur met au point une gigantesque excavatrice qui permet d'extraire d'énormes quantités de lignite en un temps record. Peu avant l'achèvement de son engin, il prend des vacances à la campagne, dans sa région natale. Dans ces terres reculées, où les hommes vivent encore en harmonie avec la nature, il découvre un gisement de lignite et décide d'y déployer sa machine. Celle-ci commence bientôt son œuvre destructrice, dont la nature fera les frais.

9 mai 2011

Les Nibelungen : la mort de Siegfried de Fritz Lang (Die Nibelungen : Siegfried - 1924)

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Premier chant – Où Siegfried terrasse le dragon

 

Dans une forge, au cœur d’une forêt mystérieuse. Siegfried de Xanten (Paul Richter), fils du roi Siegmund, présente à son maître, Mime (Georg John), le glaive qu’il vient de fabriquer. Après l'avoir attentivement examiné, le vieil homme constate avec stupeur que la lame de l’arme est si parfaite qu’elle peut trancher une plume en deux. Comprenant -non sans une certaine jalousie- qu’il n’a plus rien à apprendre à son élève, il lui annonce qu’il est temps pour lui de regagner sa patrie.

 

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Tandis qu’on lui amène sa monture, le prince surprend la conversation d’un groupe de forgerons. Celle-ci porte sur les rois burgondes -Gunther (Theodor Loos), Gernot (Hans Carl Mueller) et Giselher (Erwin Biswanger)- et leur sœur, Kriemhild (Margarete Schön). L’esprit enflammé par l’évocation de sa beauté, l’impétueux jeune homme déclare à la fin du récit qu’il va demander sa main, déclenchant aussitôt l’hilarité de ses interlocuteurs. Offensé, il se rue sur eux, menaçant de les tuer. Mime, cependant, s’interpose et calme son courroux en lui indiquant le chemin qui, affirme-t-il, le mènera à la forteresse de Worms, où est établie la cour de Bourgogne. En réalité, profondément humilié d’avoir été supplanté dans son art par un simple apprenti, il l’engage sur une route pleine de périls…

 

Siegfried croise bientôt dans la forêt le terrible dragon Fafner, qu’il parvient à mettre à mort au terme d’une lutte acharnée. Un oiseau lui révèle alors qu’il deviendra invulnérable s’il se baigne dans le sang du monstre. Le prince s’empresse de suivre son conseil. Mais dans un dernier sursaut de vie, la queue de l’animal effleure le tronc d’un tilleul, faisant tomber une feuille qui se colle au dos du jeune homme, empêchant le sang de toucher cette partie de son corps…

 

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Deuxième chant – Où Volker conte à Kriemhild les exploits de Siegfried et où Siegfried arrive à Worms

 

Siegfried traverse ensuite le pays des Nibelungen, où il est attaqué par Alberich (Georg John), le roi des elfes, qui le surprend grâce à un heaume magique. Le prince réussit tout de même à avoir le dessus sur son adversaire. Celui-ci le supplie alors de l’épargner, lui offrant son casque aux propriétés prodigieuses -il a le pouvoir de rendre invisible et autorise toutes les métamorphoses- et les fabuleuses richesses dont il a la garde. Siegfried se laisse convaincre de lui laisser la vie sauve et le suit dans son repaire secret, perdu dans la montagne.

 

Arrivé dans la salle du trésor, Alberich lui désigne, au milieu des bijoux entassés dans une immense vasque d'albâtre portée par des nains, l’épée Balmung, qu’il prétend avoir été forgée dans une fournaise sanglante et dont le pouvoir serait unique. Siegfried s’en empare. Cependant, tandis qu’il en apprécie la finition, le roi des elfes se jette sur lui et tente de l’étouffer. Le jeune homme le repousse en le frappant violemment à la tête. Mortellement touché, Alberich s’écroule. Mais dans un dernier souffle, il le voue au malheur.

 

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Devenu maître du trésor des Nibelungen, Siegfried conquiert douze royaumes, avant d’atteindre la forteresse de Worms, où il demande audience à Gunther. Hagen de Tronje (Hans Adalbert Schlettow), principal héraut de la maison royale burgonde, exhorte son maître à ne pas le recevoir. Le roi, toutefois, rejette son conseil et donne ses ordres pour qu’on lui ouvre les portes. Siegfried se présente bientôt devant lui, entouré de ses vassaux, et demande la main de sa sœur. Un marché est finalement conclu entre les deux hommes : le souverain autorisera le mariage du preux étranger avec Kriemhild, à condition qu’il l’aide à conquérir Brünhild (Hanna Ralph), une vierge guerrière régnant sur l’Islande.

 

Troisième chant – Où Siegfried conquiert Brünhild pour Gunther

 

Tandis que le drakkar transportant l’armée burgonde approche des côtes d’Islande, une pythie prédit à Brünhild l’arrivée prochaine d’un héros venu la défier. A cette annonce, la reine ordonne à ses servantes de préparer son armure.

 

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Lorsque Gunther et Siegfried paraissent enfin devant elle, la jeune femme s’approche sans hésitation de ce dernier pour lui souhaiter la bienvenue, persuadée qu’il est son prétendant. Mais le prince la détrompe et désigne Gunther. Brünhild se place alors devant le roi et, d’un air de défi, lui annonce que ses armes brisées orneront avant la fin du jour les murs de son château. Cependant, grâce à son heaume magique, Siegfried se substitue à son ami et triomphe d’elle dans chacune des épreuves. Vaincue, elle ne peut que se résigner à suivre Gunther dans son royaume. Elle lui affirme toutefois qu’elle sera seulement sa prisonnière, jamais son épouse.

 

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Quatrième chant – Où Brünhild arrive à Worms

 

De retour à Worms, la double union de Gunther et de Brünhild d’une part, de Siegfried et de Kriemhild d’autre part, est célébrée. Mais mettant sa menace à exécution, la nouvelle reine burgonde refuse de se donner à son mari. Hagen de Tronje presse alors Siegfried d’intervenir une nouvelle fois en faveur de ce dernier. Grâce à son heaume magique, le jeune homme prend l’apparence de son ami et brise l’orgueil de la mariée rebelle. Mais dans la lutte, il lui enlève son bracelet, qu’il a l’imprudence de conserver.

 

Cinquième chant – Où après six lunes, le cadeau de noces de Siegfried, le trésor des Nibelungen, parvient à Worms, et où les deux reines en viennent à se quereller

 

Le trésor des Nibelungen, cadeau de noces de Siegfried, arrive enfin à Worms. En voyant le défilé des chariots remplis d’or, Hagen observe que ces richesses permettraient de redonner du lustre au royaume de Bourgogne, suggérant ainsi que le jeune prince pourrait être éliminé. Gunther rejette néanmoins cette idée, qui reviendrait à trahir son frère de sang.

 

De son côté, Kriemhild a trouvé dans un coffret le bracelet de Brünhild et en pare son poignet. Mais Siegfried s’en aperçoit et lui commande aussitôt de le retirer, lui confiant le terrible secret dont il est la clé. La jeune femme lui promet de ne plus le porter. Cependant, tandis qu’elle se rend à la cathédrale, son chemin croise celui de Brünhild, qui s’adresse à elle d’une manière si insolente qu’elle ne peut s’empêcher à son tour de la provoquer. Elle lui montre alors le bijou et lui explique dans quelle circonstance son époux est entré en sa possession et comment celui-ci à aider Gunther à triompher d’elle. Humiliée, Brünhild tente de se jeter du haut de pont-levis de la forteresse. Hagen intervient juste à temps pour la sauver.

 

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Désormais, Brünhild n’est plus animée que par son désir de vengeance. Laissant entendre que Siegfried ne s’est pas contenté de dérober son bracelet, mais a également pris sa virginité, elle parvient à convaincre Gunther de le faire assassiner. Hagen profitera d’une partie de chasse organisée dans l’Odenwald pour commettre ce forfait. Auparavant, il devra découvrir quelle partie du corps de Siegfried n'a pas été en contact avec le sang du dragon . Usant de ruse, il obtient de Kriemhild qu’elle brode sur la tunique de son mari une croix qui désignera ce point vulnérable.

 

Sixième chant – Où Gunther romp son serment de loyauté envers Siegfried

 

La partie de chasse se déroule normalement, bien que dans une ambiance de plus en plus tendue. Au moment du déjeuner, Siegfried demande à Hagen de lui servir à boire. Celui-ci lui apprend alors que le chariot transportant le vin a eu un accident. Il lui explique qu’il pourra néanmoins étancher sa soif à une source toute proche. Et puisque le jeune homme prétend être le plus rapide, il le défie à la course. L’impétueux prince s’élance sur-le-champ et l’emporte. Cependant, tandis qu’il se penche pour boire, Hagen, qui se trouve dans son dos, le frappe avec une lance au point indiqué par Kriemhild.

 

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Septième chant – Où Kriemhild juge de se venger de Hagen de Tronje

 

Kriemhild est réveillée en pleine nuit par le retour des chasseurs. La jeune femme se précipite aussitôt pour accueillir Siegfried, mais c’est son cadavre qu’elle découvre allongé sur un lit de mousse, dans une pièce du château. Désespérée, elle se jette à terre. Elle se rend alors compte qu’il a été mortellement blessé à l’endroit précis où elle avait cousu une croix sur son vêtement. Se redressant brusquement, elle désigne Hagen comme étant le meurtrier de son mari. Toutefois, devant l’absence de réaction de Gunther, elle comprend que l’assassin a agit sur son ordre.

 

Le corps de Siegfried est ensuite transporté à la cathédrale de Worms. Lorsque Kriemhild s’y rend à son tour, après avoir menacé Hagen, elle constate que Brünhild l’a devancée et s’est suicidée en plongeant un poignard dans son cœur.

 

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Fritz Lang et Théa von Harbou, scénariste et compagne du réalisateur, signent ici une adaptation fidèle d'une vieille légende scandinave, La chanson des Nibelungen, reprise par les bardes germaniques et développée au cours du XIIème siècle. Sans doute l’un des projets les plus ambitieux des premiers temps du cinéma, avec les fresques de Giovanni Pastrone (Cabiria), David Wark Griffith (Intolérance), Cecil B DeMille (Les dix commandements) ou encore Fred Niblo (Ben-Hur : a tale of the Christ), et pour moi l’une des œuvres les plus abouties de l’histoire du Septième art, en raison de son incroyable beauté plastique, de l’extrême rigueur de sa narration et de la grande richesse de ses sources d’inspiration. Il faut dire que Lang s’est entouré ici d’une équipe de techniciens chevronnés et de grands créateurs. Tel est le cas de Carl Hoffmann, l’un des directeurs de la photographie du film, un fidèle du cinéaste, qu’il rencontra dès 1919 sur le tournage de Halbblut. Les deux hommes se retrouvèrent ensuite sur Der Herr der Liebe (1919), Die Spinnen - Der Goldene See (1919), Harakiri (1919) et Dr Mabuse der Spieler (1922). Fritz Lang fit plus tard l’éloge de son travail sur les Nibelungen, affirmant qu’il avait su donner réalité à tout ce qu’il avait pu rêver visuellement.

 

Günther Rittau et Walter Ruttmann étaient les autres opérateurs du film. Fritz Lang vanta la science du premier, lequel, rapporta-t-il, passait ses nuits à faire des expériences avec Hoffmann, embrassant l’aspect plastique du cinéma par le détour des mathématiques. On lui doit notamment l’étonnant effet de pétrification des nains dans la grotte au trésor d’Alberich. La solution imaginée par Rittau, explique l’historienne Lotte Eisner, consista à faire une surimpression du bas vers le haut, donnant ainsi l’impression que leur visage était encore vivant, alors que leur corps était déjà figé dans la pierre. Walter Ruttmann est quant à lui l’auteur du cauchemar prémonitoire de Kriemhild avant l’arrivée de Siegfried à la forteresse de Worms, un court film d’animation mettant en scène deux aigles noirs menaçant une colombe.

 

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Que l’on me permette ici une petite digression. C’est en effet le moment de corriger une information erronée d’AlloCiné au sujet du dernier film de Danny Boyle. Le site affirme ainsi que pour enrichir l'aspect visuel de 127 heures, le réalisateur britannique a décidé d'engager deux opérateurs, chose qui n'avait encore jamais été faite dans toute l'histoire du cinéma. Les Nibelungen nous offre l’exemple d’une collaboration de trois directeurs de la photographie. Et ce, dès 1924…

 

La direction artistique fut confiée à Otto Hunte et Karl Vollbrecht, deux autres fidèles de Lang, qui travaillèrent sur Dr Mabuse der Spieler, Metropolis, Spione, Frau im Mond. Les deux hommes furent, entre autres, les concepteurs du dragon, avec le décorateur de plateau Erich Kettelhut. La maquette de l’animal -une carcasse faite de cercles de métal auxquels était fixée une charpente en hêtre- faisait seize mètres de long : quatre hommes étaient installés dans chaque patte, deux se trouvaient à l’intérieur de la tête. Une boîte en fer blanc reliée à un mécanisme d’allumage et à une chambre à air était disposée dans le crâne pour produire des flammes à partir de poudre de lycopode, du soufre d’origine végétal. Pas de pixels, donc, mais des trésors d’ingéniosité…

 

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Lotte Eisner s’étonne que ce film passe aujourd’hui pour expressionniste : Où est la distorsion extatique, s’interroge-t-elle dans le livre qu’elle consacre à Lang, où sont les lignes obliques et brisées du décor de Caligari et de Raskolnikoff ? De fait, il n’y a rien de commun entre les décors équilibrés, symétriques des Nibelungen, et ceux du chef-d’œuvre de Robert Wiene ou de Von morgens bis Mitternacht de Karl Heinz Martin. On doit toutefois se souvenir que l'abstraction à outrance des films expressionnistes fut de courte durée. Pour autant, sans appartenir à cette forme primitive, nombre de productions des années 1920 ou 1930 furent influencés par l’esthétisme et les thématiques de ce mouvement artistique. Il faut, disaient les expressionnistes, se détacher de la nature et s’efforcer de dégager l’expression la plus expressive d’un objet. C’est bel et bien ce que l’on retrouve dans Les Nibelungen, où un arbre en fleur se transforme progressivement en tête de mort, où l’ombre de Hagen apparaît après la mort de Siegfried comme celle d’un inquiétant oiseau de proie.

 

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Le film de Lang est en fait l’exemple parfait de la deuxième période de l’Expressionnisme, que Laurent Mannoni et Marianne de Fleury définissent dans un entretien accordé à la Cinémathèque française comme le résultat de la synthèse entre ce courant d'avant-garde et les peintures romantiques de Friedrich et Füssli, la littérature fantastique de Goethe, Chamisso, Novalis, Hoffmann, le clair-obscur de Max Reinhardt, la psychologie allemande, volontiers morbide, son attirance vers les fondements même de l'être.

 

Dans cette œuvre où tout est soumis à une composition plastique (Lang fit des études d’architecture et de peinture), les influences sont cependant multiples. Ainsi relève-t-on une filiation évidente entre Le silence de la forêt, d’Arnold Böcklin, et la chevauchée de Siegfried à travers la forêt baignée de brume et de soleil. Mais le cinéaste et le créateur des costumes, Paul Gerd Guderian, s'inspirèrent surtout des compositions de l’artiste autrichien Carl Otto Czeschka, du groupe de la Sécession viennoise (Sezessionsstil ou Wiener Secession), qui illustra en 1909 une édition en allemand moderne des Nibelungen.

 

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Selon l’analyse du critique Siegfried Kracauer, Lang ambitionnait avec Les Nibelungen de construire un document national pour populariser la culture allemande. Par national, on ne doit pas entendre nationaliste. Pour comprendre ce terme, il faut en fait se remémorer ce que disait Henrich Heine en 1833 à propos de la psychologie allemande : Laissez à nous autres Allemands les horreurs du délire, les rêves de la fièvre et le royaume des fantômes, l’Allemagne est un pays qui convient aux vieilles sorcières, aux peaux d’ours morts, aux golems de tout sexe. Ce n’est que de l’autre côté du Rhin que de tels spectres peuvent réussir ; la France ne sera jamais un pays pour eux...

 

Malheureusement, les Allemands des années 20 se méprirent sur les intentions du réalisateur, ne voyant dans son film que l’aspect héroïque teutonique, pour reprendre l’expression de Lotte Eisner. En témoignent les critiques de l’époque : Que cette grande œuvre exceptionnelle soit une arme rayonnante de la foi allemande, qui plane au-dessus du monde, indomptée et invaincue, chant glorieux d’une humanité pure et libre. Si l’on ajoute à cela que ce film était le préféré d’Hitler et de Goebbels, on pourra légitimement nourrir de la méfiance à l’égard de son message. Pourtant, l’on doit se rappeler ici que Lang fit partie des cinéastes qui quittèrent l’Allemagne peu de temps après l’arrivée des Nazis au pouvoir. Ce qui devrait lever tout soupçon le concernant. Quant au personnage de Siegfried (celui de la légende), on se souviendra qu'Engels le considérait non pas comme un héros national guerrier, mais comme l'incarnation de la jeunesse contestaire. Rien à voir avec le national-socialisme par conséquent.

 

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A noter avant de conclure que le diptyque des Nibelungen a été présenté en version restaurée et colorée en avril dernier à Berlin. Selon Anke Wilkening, de la Fondation Murnau, cette version réalisée à partir de dix-huit copies donne une idée très précise de l’originale. En attendant une -éventuelle- nouvelle édition DVD, on se contentera de celle commercialisée par MK2, de très bonne facture.

 

Ma note : ««««« 

A lire

 

Fritz Lang, Lotte H Eisner (Petite bibliothèque des Cahiers du cinéma-Cinémathèque française, 2005)

De Caligari à Hitler, Siegfried Kracauer (L’âge d’homme, 2009)

Le cinéma expressionniste allemand : splendeur d’une collection, Marianne de Fleury, Laurent Mannoni, Bernard Eisenschitz, Thomas Elsaesser (Editions de La Martinière, 2006)

9 mai 2011

Actualité DVD

 Coffret_Albert_Capellani

La société Pathé annonce la sortie, pour le 11 mai prochain, d’un splendide coffret permettant de (re)découvrir l’œuvre de l’un des maîtres du cinéma muet, Albert Capellani. Cette édition comprend plus de dix heures de programme : outre les adaptations de quatre classiques de la littérature en copies restaurées (L’assommoir, Germinal, Le chevalier de Maison rouge et Quatre-vingt-treize), elle propose aussi une sélection de quelques courts-métrages tournés par le cinéaste au début de sa carrière : Drame passionnel, Mortelle idylle, Pauvre mère, La fille du sonneur, La femme du lutteur, L’âge du cœur et Aladin ou la lampe merveilleuse. Ce coffret contient également un livret de 40 pages.

Il n’est peut-être pas inutile de dire ici quelques mots sur Albert Capellani. Cet ancien élève du Conservatoire débuta sa carrière de réalisateur en 1905, chez Pathé-Frères. Très vite, il fut nommé à la direction artistique d'une filiale créée par Charles Pathé, la Société cinématographique des auteurs et gens de lettres, dont le but était de porter à l'écran les œuvres les plus prestigieuses de la littérature française. Albert Capellani non seulement supervisa de nombreux metteurs en scène comme George Denola, Georges Monca, Michel Carré ou Henri Estievant, mais réalisa lui même de très nombreux courts et moyens métrages (sa filmographie sur IMDB recense 168 films entre 1904 et 1922). Il fut le précurseur des longs métrages avec Le chevalier de Maison rouge, La Glu, Notre-Dame de Paris, Le courrier de Lyon, Germinal, Les mystères de Paris, Quatre-vingt-treize et Les Misérables, dans lequel il offrit à Mistinguett son premier grand rôle au cinéma. Au début de la Première guerre mondiale, Albert Capellani fut envoyé aux Etats-Unis, où il réalisa des films pour diverses compagnies, dont Pathé Exchange, avant de devenir indépendant avec la Capellani Production Inc. De retour en France au début des années 1920, il s’investit dans de nouveaux projets, mais des problèmes de santé l’empêchèrent de les mener à bien. Il est mort en 1931, à l'âge de 57 ans.

9 mai 2011

Le voleur de Bagdad de Raoul Walsh (The thief of Bagdad - 1924)

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Ahmed (Douglas Fairbanks), habile détrousseur de rue, s’empare un jour d’une corde magique dont il se sert pour s’introduire avec son complice (Snitz Edwards) dans le palais du Calife de Bagdad (Brandon Hurst). Mais tandis qu’il s’apprête à dérober le contenu d’un coffret à bijoux, une musique attire soudain son attention : ce sont les servantes de la princesse (Julanne Johnston) qui jouent pour leur maîtresse. Subjugué par la beauté de celle-ci, Ahmed n’a désormais plus qu’une obsession : enlever la jeune femme. Il décide de profiter de l'arrivée prochaine de prétendants à sa main pour mettre à exécution son projet...

 

Le jour de l’anniversaire de la princesse se présentent aux portes du palais le prince des Indes (Noble Johnson), le prince des Perses (Mathilde Comont) et Cham Shang, grand prince des Mongols, roi de Ho-Sho, gouverneur de Wah et de l’île de Wak (Sôjin). Ahmed, qui s’est procuré des habits précieux dans les bazars, se fait quant à lui passer pour le prince des Iles, des Mers et des Sept palaces. La princesse succombe aussitôt à son charme. D’autant qu’une de ses esclaves avait prédit que son futur époux serait celui qui toucherait le rosier de son jardin. Or, suite à l’emballement de sa monture, Ahmed se trouve projeté contre le dit arbuste. La princesse informe donc son père que son choix s’est porté sur ce mystérieux personnage. L’imposture de ce dernier est cependant bientôt découverte par Cham Shang. Ahmed est arrêté sur-le-champ, fouetté et condamné à être mis en pièces par les singes du Calife. Toutefois, l’intervention de la princesse auprès des gardes chargés d’exécuter la sentence lui permet d’avoir la vie sauve…

 

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Mise en demeure de faire un nouveau choix, la princesse déclare, pour gagner du temps, qu’elle prendra pour mari le prince qui lui apportera avant la fin de la septième Lune le trésor le plus rare. Informés des désirs de la jeune femme, les trois prétendants se mettent aussitôt en quête. Mais avant de quitter Bagdad, Cham Shang communique ses instructions à son esclave : il devra s’occuper de lever une armée secrète qui, en temps voulu, permettra au grand Khan de s’emparer de la ville. De son côté, Ahmed se rend à la mosquée où l'imam lui explique qu’il ne conquerra l’élue de son cœur qu’en s’engageant dans le voie de l’humilité. Il devra pour cela gagner la montagne de la Sombre aventure, où il lui faudra affronter un certain nombre d’épreuves...

 

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La première d’entre elles consiste à traverser la Vallée du feu, une grotte envahie de flammes. Puis, après avoir combattu un animal monstrueux, il accède à la Caverne des arbres enchantés, dans laquelle il se voit remettre une carte qui lui permet de rejoindre le vieil homme de la Mer de minuit. Ce dernier l’invite alors à chercher au fond de l’océan une boite cerclée de fer contenant une clef en forme d’étoile. Cependant, à peine l’a-t-il découverte que de nouveaux dangers menacent sa vie : une araignée de mer géante, puis l’image trompeuse de la princesse, qui l’entraîne à l’intérieur d’un palais sous-marin enchanté. Mais Ahmed ne se laisse pas abuser par cette illusion et remonte à la surface, où le vieil homme lui explique que la clef lui ouvrira les portes de la demeure du Cheval ailé. Cette créature fabuleuse le conduira ensuite à la citadelle de la Lune, où il devra trouver un coffre magique caché par une cape d’invisibilité…

 

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La fin de la sixième Lune approche. Les prétendants sont tous les trois entrés en possession d’un trésor d’une grande rareté. Le prince des Perses a ainsi acquis sur le marché de Shiraz un tapis magique. Le prince des Indes s’est quant à lui emparé de l’œil de cristal d’une idole de Kandahar. Cham Shang, pour sa part, a dérobé dans un tombeau de l’île de Wak une pomme d’or capable de ressusciter les morts. Un pouvoir extraordinaire dont il entend se servir pour remporter par la ruse le défi lancé par la princesse : il la fera empoisonner par l’une de ses esclaves mongols (Anna May Wong), puis se présentera au palais du Calife pour la ramener à la vie. Il ne doute pas que ce prodige convaincra la jeune femme de le choisir comme époux…

 

A la veille de rentrer à Bagdad, les princes se retrouvent dans un caravansérail. C’est l’occasion pour eux de présenter le résultat de leur quête. Après quoi, les trois hommes se préparent à se mettre en route pour la dernière étape de leur voyage. Auparavant, le grand Khan propose de vérifier dans la boule de cristal du prince des Indes que la fille du Calife respectera bien sa promesse. Mais celle-ci leur apparaît soudain mourante. Cham Shang affirme alors qu’il pourra la sauver grâce à la pomme d’or. Afin de se rendre plus rapidement à son chevet, le prince des Perses offre de les mener sur son tapis volant…

 

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La princesse échappe in extremis à la mort grâce au fruit miraculeux du prince des Mongols. Cependant, contre toute attente, la jeune femme refuse de se prononcer immédiatement en sa faveur, affirmant que sans la boule de cristal et le tapis volant, il n’aurait pu la secourir. Elle demande donc un délai supplémentaire pour délibérer. Cham Shang, qui vient d’être informé par un de ses serviteurs qu’il peut compter sur la présence de 12 000 hommes en armes dans la place, accepte sans protester sa demande. Mais la nuit venue, les troupes du grand Khan se mettent en ordre de bataille et s’emparent sans coup férir de la cité faiblement défendue. Le nouveau maître dicte aussitôt ses ordres : la princesse devra se soumettre, tandis que son père et les deux autres prétendants seront exécutés.

 

Alors qu’il approche de Bagdad, Ahmed apprend par des habitants en fuite la trahison du prince des Mongols. Lançant aussitôt à toute bride sa monture, le jeune homme arrive bientôt en vue des remparts de la ville. Utilisant alors la poudre magique contenue dans le coffre trouvé dans la citadelle de la Lune, il lève une armée gigantesque, qui provoque la déroute de l’envahisseur. Abandonné par ses partisans, Cham Shang est fait prisonnier. Quant au héros du jour, Ahmed, il se voit enfin accorder la main de sa bien-aimée…

 

9 10

 

Les contes des Mille et une nuits n’ont cessé d’inspirer le cinéma. Certains sites recensent près de trois cents adaptations. L’une des premières variations sur ce thème date de 1902, avec Ali Baba et les 40 voleurs de Ferdinand Louis Zecca, une scène comique en douze tableaux. Méliès ne fut pas en reste, avec Le palais des mille et une nuits (1905), tout comme Albert Capellani, qui porta à l’écran Aladin et la lampe merveilleuse en 1906. Mais il fallut attendre 1921 pour que sorte l’une des premières grandes productions sur ce thème : Les trois lumières (Der müde Tod), de Fritz Lang, film dont Douglas Fairbanks acquit les droits dans le but, dit-on, d’en retarder la sortie américaine, et ainsi pouvoir copier les effets visuels des séquences persanes pour Le voleur de Bagdad. L’anecdote est plausible, car elle est cohérente avec la forte implication de l’acteur sur ce projet, qui peut d’ailleurs être regardé comme le véritable promoteur de celui-ci. Il ne se contenta en effet pas d’incarner le rôle titre, il en fut aussi le producteur. Il fut également l’un des quatre auteurs du scénario (sous le pseudonyme d’Elton Thomas), avec l’ukrainien Achmed Abdullah, James T O'Donohoe et Lotta Woods. Ce fut lui aussi qui engagea William Cameron Menzies comme décorateur. Enfin, il est clair que la personnalité d’Ahmed doit beaucoup aux valeurs qu’il défendait depuis le début de sa carrière.

 

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En dépit d’une intrigue cousue de fil blanc et d’une morale un brin naïve (le héros, d’abord incroyant et égoïste, se tourne subitement vers la religion en découvrant l’amour), Le voleur de Bagdad est un conte enchanteur qui s’impose encore aujourd’hui par la créativité de ses trucages (voir les épreuves subies par Ahmed dans les montagnes de la Sombre aventure) et la démesure de ses décors. Ces derniers furent conçus par William Cameron Menzies, jeune directeur artistique de 28 ans, qui n’avait alors travaillé que sur une dizaine de films, dont The deep purple, Sérénade et Kindred of the dust de Raoul Walsh, Robin des bois d’Allan Dwan et Rositade Lubitsch. Plus tard, il collaborera, entre autres, avec Frank Borzage (The lady – 1925), George Fitzmaurice (Le fils du cheik – 1926 ; Le signe sur la porte - 1929), Lewis Milestone (Two arabian knights – 1927 ; The garden of Eden – 1928), David Wark Griffith (Drums of love – 1928 ; Le lys du faubourg – 1929 ; Abraham Lincoln – 1930)… Il officiera également sur Autant en emporte le vent (également réalisateur de la seconde équipe), pour lequel il obtint une récompense technique spéciale aux Oscars. Les décors du Voleur de Bagdad reprennent pour partie les structures utilisées pour Robin des bois, notamment le monumental château de Richard Coeur de Lion.

 

Le voleur de Bagdad vaut également par l’interprétation bondissante d’un Douglas Fairbanks alors au sommet de son art. Sa grâce aérienne, proche par moment de la danse, équilibre ce film en contrebalançant certains aspects un peu pesant de cette superproduction. Le jeu de Julanne Johnston apparaît en revanche beaucoup plus daté. A noter deux curiosités dans ce casting : la présence de l’actrice française Mathilde Comont… dans un rôle masculin (le prince des Perses) et celle d'Anna May Wong, la première vedette américaine d’origine chinoise.

 

Née le 3 janvier 1905 dans le quartier de Chinatown, à Los Angeles, Anna May Wong (de son vrai nom Wong Liu Tsong) débuta sa carrière cinématographique en 1919 dans The red lantern d’Albert Capellani (non créditée au générique). C’est en 1922 qu’elle obtint son premier grand rôle, dans le film de Chester M Franklin, The toll of the Sea, dans lequel elle interprétait Fleur de Lotus. Prestation qui fut unanimement saluée par la critique de l’époque : Miss Wong stirs in the spectator all the sympathy her part calls for, and she never repels one by an excess of theatrical feeling. She has a difficult role, a role that is botched nine times out of ten, but hers is the tenth performance. Completely unconscious of the camera, with a fine sense of proportion and remarkable pantomimic accuracy... She should be seen again and often on the screen (The New York Times). Mais cantonnée dans des rôles exotiques, elle décida de relancer sa carrière en Europe, où elle joua dans plusieurs productions majeures (Shanghaï Express de Josef von Sternberg (1932), par exemple).

 

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De retour à Hollywood au milieu des années 1930, elle connut l’humiliation de voir sa candidature refusée par la Metro-Goldwyn-Mayer pour le rôle principal de The good earth (Visages d'Orient ou La terre chinoise) de Sidney Franklin (d’après l’œuvre de Pearl S Buck), au seul prétexte que le Motion picture production code (Code Hays) interdisait les gestes intimes (tel un baiser) entre acteurs issus d’origines ethniques différentes. Luise Rainer, actrice d'origine allemande, lui alors fut préférée, ce qui valut à celle-ci l’Oscar de la meilleure actrice en 1938. Désabusée, Wong tenta sa chance en Chine. Mais victime de la propagande du gouvernement de Tchang Kaï-chek, qui considérait que ses rôles donnaient une mauvaise image du peuple chinois, elle revint en Amérique, où elle tourna dans plusieurs films de série B. Durant la guerre sino-japonaise, elle mit sa carrière entre-parenthèses et consacra son temps à défendre la cause de la Chine. Elle revint à l'écran dans les années 1950 dans plusieurs séries télévisées (dont The gallery of madame Liu-Tsong). Elle mourut d'une crise cardiaque en 1961.

 

Visuellement impressionnant, Le voleur de Bagdad ravira donc tous ceux que le cinéma muet n'indispose pas. Il est disponible dans une très belle édition restaurée avec ses teintes d'époque chez Arte.

 

Ma note : «««««

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